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Conférence: Portrait de la femme luso-descendante

Dans le cadre de la semaine du Portugal, le Carrefour des jeunes lusophones organisait une conférence sur le portrait de la femme luso-descendante. Mme Manuela Pedroso a donc été invitée pour parler du thème de la violence conjugale et son lien avec la femme luso - descendante.


Ma présentation portera sur la violence conjugale et la femme luso - descendante. En prenant pour base le système de valeurs traditionnelles de la société, toutes les relations comportent des moments de tensions et de conflits. Cependant, la violence est une manière inadéquate de résoudre ces situations. La responsabilité du succès d'une relation est encore attribuée à la femme et les statistiques démontrent que 90% des victimes sont des femmes. Dans ma présentation, quand je mentionne les hommes, c'est toujours par rapport à ce pourcentage.


Comme nous le savons, la violence n'a ni nationalité, ni religion, statut social, race ou âge. Nous pouvons tous en être victimes. La violence existe dans des relations de domination où un individu emploie des moyens subtils ou évidents afin d'obtenir tout ce qui il veut de(s) l'autre(s). L'agresseur sait atteindre les points névralgiques de sa victime, ses manques de confiance, ses doutes et ses craintes personnelles.


Il y a plusieurs définitions de la violence, mais je vais vous donner la nôtre. Notre définition est : la violence est un moyen d'exercer son contrôle sur l'autre.

Indépendamment de l'âge, de la culture, de la religion et de la race, le problème de la violence conjugale est le même pour toutes les familles qui le vivent. La violence est un problème de société qui nous affecte tous. Le système de valeurs traditionnelles de notre société a une tendance naturelle à la violence dans le couple, la privatisant et empêchant la responsabilisation de ce problème d'ordre social.


C'est ainsi qu'apparaissent les mythes. Dans la communauté portugaise, la violence conjugale n'existe pas. Notre concept de la famille est différent de celui des autres communautés. Le mariage est sacré. C'est un sacrilège de demander le divorce ou la séparation. Les femmes veulent être à l'aise. Les jeunes ne tolèrent rien. Aimer c'est souffrir.


La différence établie entre la socialisation des filles et des garçons renforce davantage les mythes. Cependant, les réalités sont bien différentes. Dans la communauté, il y a de la violence conjugale et familiale. La séparation est un des moyens, et dans la majorité des cas le seul, pour arrêter la violence : personne n'a le droit de nous maltraiter. Dieu est bon, Dieu ne punit pas, Dieu veut que tous soient heureux. Les femmes ont les mêmes droits que les hommes, elles sont des êtres humains égaux. Toutes les femmes peuvent être victimes indépendamment de l'âge. L'entourage peut être une cause de l'accumulation de tensions, de stress ou de frustrations qui grandissent et se transforment en anxiété. Plus tard, dans l'univers fermé des couples, les tensions et l'anxiété, se changent en hostilité.


Pour pouvoir mieux comprendre la dynamique de la violence conjugale, voyons le cycle de la violence. Le cycle est défini par la séquence des événements : ce n'est pas la durée d'une crise à l'autre, mais plutôt les alternances de crises. Voici ce qui arrive chez l'agresseur dans la première phase : une accumulation de tensions. Les menaces, les intimidations et les afflux colériques apparaissent. La victime elle, ressent de l'anxiété. Elle sent qu'il y a quelque chose qui ne va pas : elle se sent insécure, elle investit beaucoup d'énergie pour diminuer la tension, elle a peur et se sent paralysée. À partir de là, les agressions et les accusations se succèdent et se mélangent jusqu'à arriver à l'explosion de la violence. Dans la plupart des cas, l'agresseur utilise la violence pour obtenir ce qu'il désire de sa victime, mais, essentiellement, pour qu'elle ne fuie pas.


La seconde phase est appelée explosion de la violence. Ici, l'agresseur utilise un ou plusieurs types de violence contre sa compagne. Voyons les différents types de violence ; verbale, psychologique, économique, sexuelle, physique. Cela peut aller jusqu'à l'homicide ou, encore, jusqu'au suicide. Les formes de violence sont différentes d'un épisode à l'autre.


Ensuite, nous assistons à une progression dans l'intensité de la violence infligée en vérifiant l'escalade de la violence. Du côté de la victime, nous assistons à un sentiment d'offense : elle a honte, elle a de la colère, de la rage, elle se sent bâillonnée et humiliée. Comme nous connaissons les réactions et les conséquences vécues par les femmes après la violence, nous pouvons mieux comprendre l'angoisse émotive, la douleur et la perte ressenties par elles. Quand une personne est victime, dans la plupart des cas, à ce moment, c'est l'événement le plus pénible et le plus perturbateur de son existence.


La troisième phase est la justification et revêt une importance particulière. Quand un agresseur violente sa compagne, il la culpabilise d'en être arrivé à ce point. Il l'accuse donc de tout comme, par exemple: « C'est de ta faute. C'est toi qui m'as mis dans cet état. Tu provoques toujours les situations. Je ne trouve pas de travail parce que tu ne m'aides pas ». La victime ne sait pas comment elle doit agir et fait de la rationalisation, comme une aide aux accusations. Il est commun de ne pas contrôler ses émotions, celles-ci peuvent tourner en contradictions et les désirs, devenir ambigus. Elle justifie l'agression à l'aide de raisons, met en doute que c'est une agression, se sent responsable et la colère disparaît.


Nous arrivons à la dernière phase qui est la rémission ou lune de miel. Pour rétablir le contact, l'agresseur s'excuse. Certains pleurent, d'autres promettent de ne pas recommencer et d'autres, encore, sont prostrés pendant des heures et même des jours, essayant même de passer pour les principales victimes. Quel que soit la tactique adoptée, l'objectif est de persuader la compagne que c'était un accident. L'ensemble de ces attitudes vise à obtenir le pardon. Il est sincère quand il dit qu'il ne veut pas que ses actes de violence provoquent la destruction du couple. La rupture est l'opposé de ce qu'il recherche. La fragilité que l'agresseur manifeste durant cette période, vraie ou non, est un moyen pour faire oublier à la victime la douleur vécue. Devant cet être, dont la fragilité se manifeste par les pleurs, les excuses et la ferme intention de ne pas recommencer, la femme cède.


Surgit alors l'espoir : elle voit ses efforts pour changer, le tolère, l'aide, lui donne une autre opportunité de plus et c'est elle qui modifie ses propres attitudes. C'est la période où tout se passe à merveille. Cependant, les conditions sociales qui ont provoqué la crise restent identiques et produisent les mêmes effets. L'homme n'a pas changé.


Le cycle de la violence avec les alternances de calme et de crise, le lien émotif de la femme envers son mari, le sentiment de responsabilité par rapport à l'ambiance affective familiale, les croyances religieuses, la faible estime de soi, la peur, l'ignorance du système judiciaire et, finalement, l'insécurité économique. Les craintes de la femme sont nombreuses; peur des réactions du mari, de perdre les enfants ou de les priver de leur père, peur de la solitude, peur d'être rejetée par la famille et par les personnes qui l'entourent, peur d'être critiquée ou, encore, de mourir. Tout ceci enlise les victimes dans le tourbillon de la violence.


Il est reconnu que les femmes violentées passent par des périodes d'ambivalence, pendant lesquelles elles tentent de décider si elles doivent rester ou partir. Beaucoup de facteurs expliquent cette ambivalence.


Voyons le type de rupture:

La rupture rapide survient lorsque la femme violentée laisse l'agresseur dès les premiers comportements violents. La rupture à contrecoeur se produit quand la femme violentée est obligée, pour des motifs variés, de laisser son conjoint pour mettre fin à la violence. La rupture évolutive apparaît quand la femme violentée laisse son conjoint plusieurs fois avant de le laisser définitivement. Chaque fois qu'elle laisse l'homme violent, elle reprend confiance en elle. Cette rupture permet à la victime d'expérimenter ses ressources, sa solitude, sa capacité d'autonomie et la connaissance des endroits qui offrent de l'aide. Il est nécessaire d'accepter cette réalité, d'éviter de critiquer la victime et d'accepter son rythme de changement.


Que se passe-t-il avec les jeunes? Seront-ils victimes de violence? Oui? Non?

Les jeunes qui ont été ou sont témoins de la violence, apprennent et intègrent l'agression comme un modèle de solution aux conflits. Ils assistent quotidiennement aux manifestations de violence comme une résolution des litiges ou un accomplissement des objectifs que se fixait l'agresseur. Malheureusement, beaucoup de jeunes ont recours à la violence pour régler leurs malentendus. Des fois, les adolescents exercent un rôle actif dans la violence conjugale : ils incitent la mère à laisser l'agresseur, ils menacent de fuguer de la maison pour la contraindre à le faire, ils sont des participants actifs dans la protection de la mère, mettant en danger leur propre sécurité. Les jeunes, témoins de la violence conjugale, exhibent plus de violence dans leur vie de couple, à l'âge adulte, que ce dont ils ont été maltraités. Les jeunes filles réagissent intérieurement à leur agressivité, la tournant contre elles-mêmes, elles se ferment et se montrent passives, elles adoptent une attitude défensive comme mécanisme de protection et craignent de devenir adultes, puisque cela implique d'être dominées, maltraitées et non respectées. Malheureusement, pour beaucoup de jeunes filles, le choix est restreint et se résume à être victime ou agresseur.


À l'intérieur du climat de violence conjugale, les enfants peuvent être des victimes d'agression parce qu'ils sont essentiellement vulnérables. Ils courent de grands risques d'abus psychologiques, physiques et sexuels. Il est intéressant de noter que beaucoup d'agresseurs maltraitent leurs fils ou leurs filles. Beaucoup de femmes violentées perdent le contrôle de leur agressivité et brutalisent leurs enfants. Ils vivent en état d'alerte permanent: ils identifient les jours ou les moments à haut risque. Chez les jeunes filles, plusieurs d'entre elles sortent de la maison familiale en se mariant et retrouvent une relation semblable à ce qu'elles ont connu, si ce n'est pas pire. D'autres ont recours à des activités sociales, culturelles ou sportives. La violence laisse des marques profondes chez l'individu.


Selon les statistiques, 12% des enfants issus d'un milieu familial violent, reproduiront cette attitude dans leur future vie conjugale. Nous ne pouvons pas oublier l'importance des modèles d'apprentissage et leur impact, quand ils sont représentés par des personnes affectivement importantes. Ces modèles sont encore renforcés par les messages sociaux. Notre message est de briser le silence et l'isolement.

  • Parler du problème à une personne de confiance.

  • S'informer de ses droits.

  • S'informer des possibilités d'arrêter le cycle de la violence en sécurité.

  • Obtenir de l'aide en toute confidentialité.

  • Personne n'a le droit de nous faire du mal.

Exposante: Manuela Pedroso

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